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{"id":517,"date":"2022-01-27T11:33:57","date_gmt":"2022-01-27T10:33:57","guid":{"rendered":"http:\/\/wordpress.michelebarange.com\/biographie-copy\/"},"modified":"2022-03-18T14:57:47","modified_gmt":"2022-03-18T13:57:47","slug":"textes","status":"publish","type":"page","link":"https:\/\/www.michelebarange.com\/textes\/","title":{"rendered":"Textes"},"content":{"rendered":"\n\n[et_pb_section fb_built=\u00a0\u00bb1″ _builder_version=\u00a0\u00bb4.14.4″ _module_preset=\u00a0\u00bbdefault\u00a0\u00bb global_colors_info=\u00a0\u00bb{}\u00a0\u00bb][et_pb_row _builder_version=\u00a0\u00bb4.14.4″ _module_preset=\u00a0\u00bbdefault\u00a0\u00bb global_colors_info=\u00a0\u00bb{}\u00a0\u00bb][et_pb_column type=\u00a0\u00bb4_4″ _builder_version=\u00a0\u00bb4.14.4″ _module_preset=\u00a0\u00bbdefault\u00a0\u00bb global_colors_info=\u00a0\u00bb{}\u00a0\u00bb][et_pb_text content_last_edited=\u00a0\u00bboff|desktop\u00a0\u00bb _builder_version=\u00a0\u00bb4.14.4″ _module_preset=\u00a0\u00bbdefault\u00a0\u00bb header_font=\u00a0\u00bbRoboto||||||||\u00a0\u00bb header_text_align=\u00a0\u00bbcenter\u00a0\u00bb header_font_size=\u00a0\u00bb40px\u00a0\u00bb hover_enabled=\u00a0\u00bb0″ global_colors_info=\u00a0\u00bb{}\u00a0\u00bb sticky_enabled=\u00a0\u00bb0″]
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Textes sur les oeuvres de Mich\u00e8le Barange<\/h1>\n \n\n<\/div>\n<\/div>\n
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Alchimie du noir<\/h2>\n<\/div>\n
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\u00ab\u00a0La vie d\u2019une toile, sa force, sa richesse, c\u2019est la richesse des forces contradictoires qui l\u2019ont fait na\u00eetre.\u00a0\u00bb – Jean Bazaine<\/blockquote>\n \n\nC\u2019est \u00e0 quelques pas de la Place de Bretagne, dans la vieille \u00e9picerie de son enfance que Mich\u00e8le Barange a install\u00e9 son atelier. C\u2019est dans ce lieu, encore bruissant de souvenirs, r\u00e9fugi\u00e9 dans ces coulisses urbaines, accost\u00e9 par une Vilaine fugitive, qu\u2019elle compose une \u0153uvre qui s\u2019affirme d\u2019ann\u00e9e en ann\u00e9e. Si le doute demeure, il constitue un adjuvant salutaire, car il invite l\u2019artiste \u00e0 s\u2019interroger sans cesse sur son travail, qui d\u00e9hale vers des espaces insoup\u00e7onn\u00e9s. Sa d\u00e9marche s\u2019apparente ainsi \u00e0 un nomadisme formel. \u00ab\u00a0Allez au plus profond de soi et au plus loin dehors\u00a0\u00bb, \u00e9crit Antoine Emaz,\u00a0\u00ab\u00a0la po\u00e9sie reste pour moi la parole la plus apte \u00e0 avancer encore, dans le noir\u00a0\u00bb, poursuit-il. Cette r\u00e9flexion peut s\u2019appliquer \u00e0 Mich\u00e8le Barange, dont la peinture joue de cette proximit\u00e9 et de cet \u00e9loignement. Elle est un moyen de se d\u00e9couvrir en creusant le noir qui motive sa d\u00e9marche et de s\u2019aventurer dans un paysage recadastr\u00e9, tout en recherchant l\u2019alt\u00e9rit\u00e9 et la communion avec l\u2019autre.\n\nLa blancheur de la toile n\u2019a pas l\u2019attrait mim\u00e9tique de la neige ou de l\u2019\u00e9cume pour le peintre. Au contraire, elle repr\u00e9sente un espace tyrannique qui impose ses vertiges et t\u00e9tanise tout \u00e9lan cr\u00e9ateur. Aussi l\u2019artiste pour conjurer cette pr\u00e9sence inqui\u00e9tante du blanc la recouvre d\u2019un fond noir, cong\u00e9diant ainsi toute lumi\u00e8re. Et c\u2019est de cette nuit qu\u2019elle s\u2019impose que va na\u00eetre l\u2019\u0153uvre. Le peintre va embraser son ciel nocturne de ses couleurs ardentes, qui la r\u00e9concilient avec cette intranquillit\u00e9 initiale, la nuit s\u2019\u00e9loignant peu \u00e0 peu sous leur harc\u00e8lement. Le geste et le d\u00e9sir s\u2019unissent pour \u00e9baucher les seuils de l\u2019\u0153uvre, communiant avec ces couleurs qui jubilent. Ce rituel inaugural serait comme un stratag\u00e8me devant une inspiration volage, ou co\u00efnciderait avec l\u2019attitude du ph\u00e9nix, car rien pour Mich\u00e8le Barange n\u2019est acquis, tout est \u00e0 recommencer. Mais cette appr\u00e9hension est salutaire, car elle impose \u00e0 l\u2019artiste de se mesurer \u00e0 l\u2019\u00e9preuve de la toile, \u00e0 interroger les asp\u00e9rit\u00e9s du noir pour apprivoiser la lumi\u00e8re. Elle va ainsi jusqu\u2019\u00e0 l\u2019exhaustion de ses \u00e9motions, guid\u00e9e parfois par une intuition qui m\u00e9tamorphose alors ses doutes en formes inattendues et en un univers solaire. Les premi\u00e8res notes de couleurs br\u00fblent ainsi l\u2019opacit\u00e9 nocturne et leur embrassement lib\u00e8re le d\u00e9sir audacieux de cr\u00e9er, fait germer l\u2019aventureux appel des profondeurs, comme si Mich\u00e8le Barange hissait soudain un univers enfoui sous ce noir pour l\u2019amener \u00e0 un degr\u00e9 de transparence et de fluidit\u00e9 gagn\u00e9es. Mais la nuit demeure inusable. Des lambeaux d\u2019ombre s\u2019\u00e9garent ici et l\u00e0 dans la densit\u00e9 lumineuse des couleurs m\u00e9tiss\u00e9es sous la migration du pinceau. Ils contredisent l\u2019oubli de la nuit. Ils sont les reliefs tenaces de cette nuit qui refuserait de d\u00e9serter la sc\u00e8ne o\u00f9 s\u2019est jou\u00e9 l\u2019acte primordial. Ces failles d\u2019ombre soulignent la pr\u00e9sence chtonienne, les \u00e9chos ou les vestiges de cette efflorescence chromatique. Ces traces qui affleurent se retrouvent dans d\u2019autres \u0153uvres de Mich\u00e8le Barange qui pratique souvent l\u2019art du recouvrement. L\u2019artiste n\u2019h\u00e9site pas en effet \u00e0 sacrifier des toiles plus anciennes, illustrant ainsi le propos de Giacometti\u00a0:\u00a0\u00ab\u00a0Je ne fais qu\u2019en d\u00e9faisant\u00a0\u00bb. De ses \u0153uvres nouvelles s\u2019exondent les strates des peintures anciennes. Le tableau esquisse alors un rapport m\u00e9moriel o\u00f9 le pass\u00e9 n\u2019est pas compl\u00e8tement aboli et flirte avec les signes, les scarifications d\u2019un pr\u00e9sent, car Mich\u00e8le Barrage lac\u00e8re la toile, la creuse \u00e0 la mani\u00e8re du graveur, comme pour tourmenter le silence de sa surface, toucher la nuit des abysses et lui d\u00e9rober l\u2019intensit\u00e9 de sa lumi\u00e8re. Ainsi ses tableaux-palympsestes conjuguent deux temporalit\u00e9s, l\u2019une sous-jacente, legs de l\u2019\u0153uvre ancienne et l\u2019autre \u00e9corch\u00e9e par les tensions du monde.\n\nOn n\u2019entre pas dans l\u2019\u0153uvre de Mich\u00e8le Barange par effraction, m\u00eame si parfois on devine des influences qui conditionnent notre regard et le rassure. Malgr\u00e9 une filiation avec l\u2019abstraction lyrique, l\u2019artiste privil\u00e9gie le paysage. Celui-ci s\u2019ordonne dans l\u2019\u00e9quilibre turbulent des couleurs. Elle le r\u00e9invente en permanence, d\u00e9jouant ainsi les pi\u00e8ges de sa repr\u00e9sentation attendue. Il se situe aux fronti\u00e8res d\u2019un r\u00e9el revisit\u00e9 et de l\u2019abstraction. Il \u00e9merge d\u2019une chor\u00e9graphie de l\u2019acrylique et l\u2019huile et des effets impromptus que leur complicit\u00e9 provoque. Ainsi couleurs, plis, coulures et coutures d\u2019ombre s\u2019accordent pour sugg\u00e9rer un univers terraqu\u00e9 et min\u00e9ral, o\u00f9 l\u2019on devine une lisi\u00e8re d\u2019arbres, un escarpement scabieux, un mur \u00e9caill\u00e9 par la tendresse des pluies, un horizon \u00e9vanescent dans le mouvement saccad\u00e9 des nuances, avec parfois un rose audacieux, comme \u00e9chou\u00e9 au milieu du tableau et qui pourrait troubler la vue, si n\u2019intensifiait pas les ocres et les rouges environnants.\n\nSi l\u2019artiste d\u00e9samorce l\u2019autorit\u00e9 du blanc, le lieu exerce aussi son influence et dicte ses exigences. La grandeur de son atelier lui permet de r\u00e9aliser de grandes toiles, mais aussi de peindre des s\u00e9ries gigognes. Ces derni\u00e8res font songer un peu aux ricochets d\u2019une pierre sur l\u2019eau quand ses ocelles s\u2019\u00e9largissent au fil de sa course. Chaque toile s\u2019all\u00e9geant un peu plus de l\u2019intensit\u00e9 chromatique de la premi\u00e8re tout en se d\u00e9halant de la forme initiale dans le jeu des interf\u00e9rences. Ces variations illustrent bien l\u2019obstination de l\u2019artiste \u00e0 interpeller toujours plus la mati\u00e8re. Habitu\u00e9e au grand format carr\u00e9, elle a cr\u00e9\u00e9 r\u00e9cemment de grandes toiles rectangulaires en fonction de son nouveau lieu d\u2019exposition, car l\u2019\u0153uvre fait sens par rapport \u00e0 l\u2019espace qui l\u2019accueille. Ces formats impliquent une relation \u00e9vidente au corps, \u00e0 ce corps \u00e0 corps que l\u2019artiste recherche, afin que le tableau r\u00e9v\u00e8le toute son \u00e9nergie. Merleau-Ponty n\u2019\u00e9crit-il pas que\u00a0: \u00ab c\u2019est en pr\u00eatant son corps au monde que le peintre change ce monde en peinture\u00a0\u00bb. Avec ses grands oeuvres rectangulaires le corps du spectateur est mis \u00e0 son tour \u00e0 l\u2019\u00e9preuve. Il ne peut esquiver ce rapport de forces avec la peinture. Mich\u00e8le Barange l\u2019invite ainsi comme l\u2019\u00e9crit Victor Segalen\u00a0: \u00ab\u00a0\u00e0 voir seulement \u00ab\u00a0et de \u00ab\u00a0tout oublier \u00e0 l\u2019entour\u00a0\u00bb.\n\nEn conjuguant les contrastes, le noir comme auxiliaire de la lumi\u00e8re, l\u2019acrylique comme une urgence face \u00e0 la mat\u00e9rialit\u00e9 temporelle de l\u2019huile, la violence du geste pour saisir une s\u00e9r\u00e9nit\u00e9, le signe ou ses avatars pour inscrire davantage dans la chair de l\u2019\u0153uvre une vibration, une histoire, l\u2019abstraction pour mieux red\u00e9finir le paysage qui se recompose dans l\u2019imaginaire du spectateur, Mich\u00e8le Barange r\u00e9v\u00e8le l\u2019intranquillit\u00e9 d\u2019une \u0153uvre qui tend \u00e0 cerner des \u00ab\u00a0florides\u00a0\u00bb et \u00e0 s\u2019approcher un peu plus de son soleil int\u00e9rieur.\n
– Alain Le Beuze\n\n \n\n \n\n <\/blockquote>\n \n\n\"\"\n\n<\/div>\n<\/div>\n
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Rose d\u2019apr\u00e8s nature\nSur la peinture de Mich\u00e8le Barange<\/h2>\n<\/div>\n
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– Philippe Gou\u00ebt, avril 2010<\/blockquote>\n \n\nSans la main du peintre nous n\u2019aurions pas eu vent de ce qui \u00e9chappe \u00e0 la monotonie des g\u00e9om\u00e9tries quotidiennes. Humide et brillante, elle lisse le phras\u00e9 r\u00e9p\u00e9titif des petites pens\u00e9es journali\u00e8res. Elle d\u00e9route l\u2019incise noire et blanche de la fatigue et des travaux, et fait trembler le d\u00e9calque mental des \u00e9chafauds calligraphiques.\n\nNous voici restitu\u00e9s \u00e0 l\u2019oubli, et donc \u00e0 la m\u00e9moire de ces infimes instants o\u00f9 nous pressentions l\u2019\u00e9chapp\u00e9e fulgurante d\u2019une pr\u00e9sence, d\u2019une joie cach\u00e9e, sous le voile des images et des mots.\nNous voici all\u00e9g\u00e9s de tous les signes, invit\u00e9s au glissement vers la couleur.\n\nLe geste du peintre s\u2019installe dans la ponctuation, l\u00e0 o\u00f9 notre regard ne saisit que les points de suspension.\nD\u2019un point \u00e0 l\u2019autre, d\u2019une couleur \u00e0 l\u2019autre, une aube se pr\u00e9cise, une lumi\u00e8re en amont du d\u00e9sir\u00a0: celle que l\u2019on entrevoit en fermant les yeux sur le monde pour le retrouver.\n\nNous voici assign\u00e9s \u00e0 la couleur comme en une r\u00e9sidence dont la beaut\u00e9 d\u00e9livre le secret de la naissance du jour.\n\n \n\n \n\n \n\n\"\"\n\n \n\n<\/div>\n<\/div>\n
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Plages de vie\nSur les peintures de Mich\u00e8le Barange<\/h2>\n<\/div>\n
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– Yves Bergeret, 1er f\u00e9vrier 2010<\/blockquote>\n \n

Plages de vie\u00a0: ainsi sont les nouvelles peintures de Mich\u00e8le Barange. Plages de vie humaine. Si l\u2019on prend le temps de les regarder, une foule d\u2019\u00e9v\u00e9nements les constitue. On y voit tr\u00e8s nettement le travail au long cours, dans la lenteur des temps de pr\u00e9paration, d\u2019apposition puis de s\u00e9chage des couches de la peinture en premier acrylique puis \u00e0 l\u2019huile, tout ce travail au long cours qui a peu \u00e0 peu fait de l\u2019\u0153uvre ce que maintenant elle est.<\/p>\nEt voici que la perception se ralentit encore\u00a0: voici qu\u2019elle s\u2019ouvre \u00e0 toute une histoire. Car la mati\u00e8re est si dense et si riche qu\u2019elle constitue une g\u00e9ologie s\u00e9dimentaire. Du temps rendu clairement visible. Des heures et des jours et des semaines de d\u00e9p\u00f4ts, d\u2019\u00e9rosion, de g\u00e9sine, d\u2019\u00e9corchement et de nouveaux d\u00e9p\u00f4ts. D\u2019\u00e9rosion. Et curieusement rien ne p\u00e8se\u00a0: parce qu\u2019un rite habite cette mati\u00e8re et la met en respiration.\n\nJe ralentis encore mon regard et ma perception. Je m\u2019approche de la toile pour mieux la voir. Et ainsi me trouv\u00e9-je plus pr\u00e8s d\u2019un sol\u00a0: je vois ses vall\u00e9es, ses ravins, ses menues falaises et ses failles, ses coulures de boue ici fig\u00e9e, ses sables \u00e9tir\u00e9s l\u00e0, ses argiles \u00e9tal\u00e9es et d\u00e9laiss\u00e9es. Je vois ce grand geste de la main qui les brasse et les trace, qui les pose et les rel\u00e8ve et les d\u00e9pose encore, ce grand geste des doigts, ou ici de la brosse, l\u00e0 du couteau. Je vois ce beau labeur de vivre, cette caresse de la tendresse et de la souffrance. Je vois ce besoin de toucher, de palper, d\u2019\u00e9prouver\u00a0; je sens cette intention d\u2019atteindre dans la mati\u00e8re un au del\u00e0 de la mati\u00e8re\u00a0; ce besoin insistant, lucide et jamais d\u00e9courag\u00e9, presque c\u00e9r\u00e9moniel, de trouver la forme d\u00e9cisive qui mette terme \u00e0 la gestation.\n\nJe ralentis encore le temps. Mich\u00e8le Barange travaille la toile \u00e0 plat, horizontale au sol. Sa toile est une terre, un humble jardin, un terreau. Un sol d\u00e9limit\u00e9 entre les bras du peintre, pr\u00e8s de ses jambes. Le peintre se penche vers ce sol si intense, si proche, rugueux, rebelle et tendre. R\u00e9tif et aimant. Voici, le peintre en fait ce temple, petit \u201c\u00a0temenon\u00a0\u201d\u00a0: c\u2019est-\u00e0-dire jeune enclos o\u00f9 du sacr\u00e9 affleure et afflue. Surface \u00e9trange o\u00f9 la vie se fait dense et soudain si volubilement pr\u00e9sente. Plages de vie. Le geste du peintre envo\u00fbte, requiert, agite, brasse. Peindre ainsi sur et dans cette terre intense, c\u2019est ouvrir un rite\u00a0; c\u2019est sacraliser cette terre n\u00f4tre. Ainsi sauver la p\u00e2leur du jour et la tristesse du monde. Lib\u00e9rer dans son \u00e9paisseur muette une histoire. Mettre le modeste temple de ce sol en dramaturgie. La toile est le beau et lent combat du sens du destin\u00a0: une solitude humaine, belle et grave comme un jeune dieu esseul\u00e9 qui cherche sa phrase, sa m\u00e9lodie, son profil et son nom et ne trouve rien de tout cela parce que peindre maintenant, en 2010, est mettre au grand jour le d\u00e9sarroi des dieux anciens, dispers\u00e9s dans la confusion violente du monde. Peindre pourtant, sans rel\u00e2che, chercher le sens.\n\nBeau et grave est ce geste de Mich\u00e8le Barange qui cherche dans le carr\u00e9 de toile pos\u00e9 au sol un salut et un sens. Dans un monde o\u00f9 salut et sens sont brouill\u00e9s, si ce n\u2019est confus. Poser encore et encore sur la toile au sol la couleur et la couleur, c\u2019est accomplir \u00e0 n\u2019en plus finir le rite d\u2019un grand sacrifice, imm\u00e9morial, qui restitue pour un court temps au monde une pl\u00e9nitude. On caresse avec la p\u00e2te c\u00e9r\u00e9monielle le socle, on patine l\u2019autel, le pauvre enclos sacr\u00e9. On macule et macule encore avec le sang de la victime sacrificielle et on restaure pour un temps l\u2019espoir d\u2019une vie envisageable et la silhouette d\u2019un sens assumable.\n\nOr voici que dans la mati\u00e8re, depuis peu de mois, Mich\u00e8le Barange incise des traits, signes inconstitu\u00e9s, lettres parfois, chiffres occasionnellement\u00a0; presque une \u00e9criture. Mais une avant-\u00e9criture, l\u2019aube du signe. En creux, le\u00a0plus souvent\u00a0: par incision dans la mati\u00e8re avec l\u2019autre bout du pinceau, ac\u00e9r\u00e9. Comme une ultime cicatrice, blessure adventice et salvatrice, qui cr\u00e9e distance dans la g\u00e9ologie sacrificielle\u00a0: juste ce simple trait, pr\u00e9cis\u00e9ment et terriblement humain, qui signe et suspend la liturgie sacrificielle en plein murmure, en plein bourdonnement et la suspend dans une harmonie souveraine et digne o\u00f9 la couleur ne saigne plus et, en connaissance de cause, sourit.\n\n \n\n \n\n<\/div>\n<\/div>\n

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Mich\u00e8le Barange : \u00e0 dessein<\/h2>\n<\/div>\n
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Christe Jhelil, plasticienne\nSeptembre 2005<\/blockquote>\n \n\nCh\u00e2ssis entoil\u00e9s, peinture \u00e0 l’huile, m\u00e9tier ma\u00eetris\u00e9 : Mich\u00e8le Barange est peintre. Des gris, des ocres, des rouges : la palette entretient une \u00e9troite relation avec le jeu de la lumi\u00e8re ; volontairement r\u00e9duite, elle se d\u00e9cline subtilement, en de multiples nuances dans les vibrations des franges des couches color\u00e9es m\u00e9thodiquement superpos\u00e9es ou des failles gratt\u00e9es dans la surface pulpeuse. Des morceaux de couleur comme autant de moments de vie. Dans cette facture acad\u00e9mique qui ne laisse gu\u00e8re de place \u00e0 l’expression du hasard, pas de d\u00e9bordement apparent. L’oeuvre est cons.truite jusque dans la pr\u00e9sentation compos\u00e9e dans un ordonnancement rigoureusement architectur\u00e9.\n\nNarrative, l’oeuvre est un carnet de voyage ; chaque toile est une page au croisement des regards de l’artiste sur le monde qui l’entoure. Dans l’intimit\u00e9 de l’\u00e9paisseur de la peinture, elle \u00e9crit son histoire. M\u00e9moires grav\u00e9es comme on marque les troncs d’arbres ou les vieilles pierres. Traces presque effac\u00e9es comme celles qu’emporte la mer sur le sable mouill\u00e9. L’espace pictural est intemporel.\n\nLe geste est mesur\u00e9 qui s’attarde dans les recouvrements comme si l’artiste tirait lentement, sur le silence du temps \u00e9coul\u00e9, voile apr\u00e8s voile. Le geste est incisif qui s’insinue dans la mati\u00e8re, griffe de quelques motifs graphiques les ‘p\u00e2tes encore tendres de la couleur, des impressions ressenties, des sensations analys\u00e9es. La touche suit les m\u00eames lois de l’opposition : tant\u00f4t liss\u00e9e et calme, tant\u00f4t irr\u00e9guli\u00e8re, retenue ou vive.\n\nDe la mesure perceptible donn\u00e9e au regard sourd une nostalgie au sens noble du terme, pas de celle qui larmoie dans les replis du pass\u00e9, une nostalgie source \u00e9motionnelle d’emprunt \u00e0 ce qui est r\u00e9volu pour revitaliser le pr\u00e9sent, se donner, au-del\u00e0 de la destruction, les moyens de (‘avenir. Mich\u00e8le Barange capte les offrandes de la nature du brin d’herbe qui ondoie \u00e0 la surface de l’eau \u00e0 l’\u00e9clair lumineux qui effleure un instant si fugace sa toile tout comme elle s’attarde \u00e0 retrouver l’impression d’une rencontre ou encore le choc de l’actualit\u00e9 socio-politique de notre temps.\n\nAinsi en t\u00e9moigne cette suite de r\u00e9cents dessins sur papier d’une poignante profondeur o\u00f9, entre virtuosit\u00e9 et \u00e9motion, se m\u00ealent foi et esp\u00e9rance dans un silence mystique que trouble une lueur immat\u00e9rielle. Chaque dessin est un sanctuaire, un lieu du souvenir, frapp\u00e9 d’une date matricule qui r\u00e9sonne funestement dans les gris tragiques du graphite tourment\u00e9 : le cycle de l’histoire rattrape l’artiste depuis cet accident d’un avion qui aurait pu \u00eatre le sien tandis qu’elle rentrait d’un voyage en Egypte, depuis ces autres avions un 11 septembre… Chaque dessin est une anthologie po\u00e9tique.\n\n \n\n \n\n \n\n \n\n<\/div>\n<\/div>\n
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Mich\u00e8le Barange et le peuple des signes<\/h2>\n<\/div>\n
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Philippe Gou\u00ebt\n2001<\/blockquote>\n \n\nL’homme est en exil de l’\u00eatre.\n\nEcart\u00e9, nu et solitaire, du d\u00e9dale anonyme o\u00f9 bat, impassible, indiff\u00e9rent \u00e0 son destin, le c\u0153ur de tout ce qui vit, il construit arm\u00e9 d’une patience mill\u00e9naire, son royaume en un rempart de signes.\n\nAinsi, il n’est plus vrai que les hommes ne s’\u00e9veillent que pour mourir. Ils surgissent, envelopp\u00e9s de lumi\u00e8re et d’effroi, \u00e0 la lisi\u00e8re d’obscures for\u00eats, ou s’y enfoncent d\u00e9cid\u00e9s \u00e0 ne plus jamais se perdre parmi le peuple innombrable des arbres et des esprits. Au plus intime de chacun d’entre eux, d’entre nous encore, la nuit rec\u00e8le le souvenir des peurs imm\u00e9moriales de tr\u00e8s anciens \u00e9blouissements ou de c\u00e9cit\u00e9s fatales.\n\nMais les hommes invent\u00e8rent la peau.\n\nL’\u0153uvre de Mich\u00e8le Barange t\u00e9moigne d’abord de cette invention. Mais, surtout, elle rend hommage \u00e0 la lente et endurante obstination des hommes \u00e0 d\u00e9fricher les espaces, \u00e0 imposer au regard vide du ciel au-dessus d’eux, les surfaces qu’ils marquent des signes de leur distinction et de leur ma\u00eetrise : la terre est une peau, mais aussi l’\u00e9tendue lisse de la mer, l’\u00e9corce et la fibre des arbres, le tissu des herbes et des feuilles, les mailles invisibles des min\u00e9raux, la texture des plumes et le cuir des pelages.\n\nPar le soc et l’\u00e9trave, au couteau, au crayon et \u00e0 l’encre, les hommes gravent, cis\u00e8lent, taillent, dessinent un univers de signes dont l’apprentissage et la lecture sont l’initiation n\u00e9cessaire afin de p\u00e9n\u00e9trer un monde devenu humain parce que, pr\u00e9cis\u00e9ment, lisible. Et jusque sur la peau de leur propre corps ils portent le fer de l’incise, tatouage ou scarification, qui concentre le sens d’une distinction humaine et fi\u00e8re : l’homme lui-m\u00eame se donne \u00e0 lire.\n\nChaque tableau de Mich\u00e8le Barange est une invitation \u00e0 cette lecture : l’\u00eatre, immobile et lointain, comme une menace ou une promesse de libert\u00e9, surplombe et domine l’espace conquis par le jeu des signes sur la peau de la toile ; au-dessous il nous faut d\u00e9chiffrer le palimpseste orgueilleux d’une humanit\u00e9 qui s’initie \u00e0 elle-m\u00eame gr\u00e2ce au pouvoir d’une calligraphie qui n’est autre que celle de son d\u00e9sir d’\u00eatre.\n\nAu del\u00e0 des races et des territoires, qui ne sont que de vains ou improbables fantasmes, le travail de Mich\u00e8le Barange nous restitue la m\u00e9moire de notre appartenance au seul peuple qui vaille pour nous, le peuple des signes.\n\n \n\n \n\n \n\n<\/div>\n<\/div>\n
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Sur une dizaine de palimpsestes orang\u00e9s\nPeintures de Mich\u00e8le Barange<\/h2>\n<\/div>\n
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Yves Bergeret\n1996<\/blockquote>\n

Les toiles orang\u00e9es de Mich\u00e8le Barange d\u00e9ploient une s\u00e9duction \u00e9trange. Elles sont abstraites mais dou\u00e9es de la sensibilit\u00e9 concr\u00e8te d’une terre glaise dress\u00e9e vers le ciel.<\/p>\n

Elles paraissent d’abord des relev\u00e9s de fouillis d’empreintes sur un sol argileux, m\u00e9lange d’une nature \u00e0 la fois en gestation et en d\u00e9composition; mais ce panorama intime d’une vue plongeante sur le sol, \u00e0 nos pieds, est dress\u00e9 verticalement en panneaux fiers, et voil\u00e0 que leur fra\u00eecheur hardie contredit l’horizontalit\u00e9 placide du sol.<\/p>\n

Epaisse para\u00eetrait la mati\u00e8re de ce sol \u00e9rig\u00e9, lourde, t\u00eatue; mais en m\u00eame temps les couches de cette terre argileuse sont p\u00e9n\u00e9tr\u00e9es d’air et de lumi\u00e8re, si bien que chaque tableau para\u00eet n’exister qu’en surface. De la sorte, ces tableaux offrent le spectacle de leur h\u00e9sitation entre surface et profondeur.<\/p>\n

Regardons-les encore, nous sommes intrigu\u00e9s. Nous sentons maintenant un mouvement dans ces empreintes argileuses : c’est celui de la lumi\u00e8re, d’une sorte d’excitation de la lumi\u00e8re, jubilante, qui remue la terre.<\/p>\n

Est-ce bien la lumi\u00e8re seule qui agit ? Des masses bougent aussi, dans une rotation lourde et lente. Et l’on reconna\u00eet bient\u00f4t, \u00e9mergeant de l’\u00e9paisseur et de la m\u00e9moire, dans ce tableau un torse, dans cet autre tableau une effigie humaine, dans cet autre une momie, ici un torse encore, l\u00e0 un accouplement lourd de grands animaux. D’o\u00f9 viennent ces \u00ab\u00a0figures\u00a0\u00bb qui \u00e9chappent \u00e0 la forme ?<\/p>\n

Ou n’est-ce pas plut\u00f4t qu’elles n’ont pas encore de formes ?<\/p>\n

Or la plupart de ces tableaux sont compos\u00e9s de trois bandes, le plus souvent horizontales. Sur les trois, une se pr\u00e9sente l\u00e9g\u00e8rement inaboutie, informelle, comme pour signifier une sensibilit\u00e9 et un \u00ab\u00a0dessin\u00a0\u00bb h\u00e9sitants. On voit alors beaucoup mieux que ces empreintes de terre glaise insuffl\u00e9es de lumi\u00e8re, en pr\u00e9sentant les empreintes de figures \u00e0 venir, montrent le cheminement du temps.<\/p>\n\n<\/div>\n<\/div>\n<\/div>[\/et_pb_text][\/et_pb_column][\/et_pb_row][\/et_pb_section]\n\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"

Textes sur les oeuvres de Mich\u00e8le Barange   Alchimie du noir   \u00ab\u00a0La vie d\u2019une toile, sa force, sa richesse, c\u2019est la richesse des forces contradictoires qui l\u2019ont fait na\u00eetre.\u00a0\u00bb – Jean Bazaine   C\u2019est \u00e0 quelques pas de la Place de Bretagne, dans la vieille \u00e9picerie de son enfance que Mich\u00e8le Barange a install\u00e9 […]<\/p>\n","protected":false},"author":1,"featured_media":0,"parent":0,"menu_order":0,"comment_status":"closed","ping_status":"closed","template":"","meta":{"_et_pb_use_builder":"on","_et_pb_old_content":"","_et_gb_content_width":"","footnotes":""},"class_list":["post-517","page","type-page","status-publish","hentry"],"yoast_head":"\nTextes sur les \u0153uvres de Mich\u00e8le BARANGE | Mich\u00e8le BARANGE<\/title>\n<meta name=\"description\" content=\"Textes sur les \u0153uvres de Mich\u00e8le BARANGE\" \/>\n<meta name=\"robots\" content=\"index, follow, max-snippet:-1, max-image-preview:large, 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